Affinity therapy - Nouvelles recherches sur lâautisme par Sophie Le Goff le 26 mai 2016 Affinity therapy - Nouvelles recherches sur lâautisme est un livre constituĂ© de tĂ©moignages cliniques prĂ©cieux de sujets autistes, de familles, mais aussi de professionnels, considĂ©rant les obsessions » des sujets autistes non pas comme des obstacles mais comme un appui pour accĂ©der aux » Selon Lacan, lâautiste sâengouffre [âŠ] dans un systĂšme oĂč les objets se substituent les uns aux autres [âŠ], il dĂ©plie et articule ainsi tout son monde. Et puis de la bassine dâeau, il passe Ă un radiateur Ă©lectrique, Ă des objets de plus en plus » Cette chaĂźne mĂ©tonymique dâobjets constitue peu Ă peu des bords, des circuits pulsionnels. Ce nĂ©o-bord se dĂ©cline grĂące Ă lâobjet autistique, au double imaginaire ou Ă lâĂźlot de compĂ©tences Ă©voquĂ© par Jean-Claude Maleval. Il constitue une interface rassurante entre le sujet et le monde qui lâentoure et a pour fonction de condenser la jouissance, tout en Ă©tant propice Ă lâĂ©laboration dâun savoir singulier. Cependant, si les lubies ou obsessions des enfants autistes dĂ©voilent un mode de jouissance singulier, elles sont aussi et surtout des stratĂ©gies dĂ©fensives, afin de parer Ă lâangoisse. Selon Temple Grandin, les adultes autistes de haut niveau qui sont capables de vivre de façon autonome et de garder un emploi stable font souvent un travail dans le mĂȘme domaine que les obsessions de leur » Il sâagit dĂšs lors dâinventer Ă partir dâun point dâimmuabilitĂ©4 ». LĂ©o Kanner en a lui aussi lâintuition en 1971, lorsquâil sâintĂ©resse au devenir des enfants quâil a rencontrĂ©s en 1943, lors de sa description de lâautisme. Donald, lâun de ces enfants, a Ă©tĂ© placĂ©, en 1942, durant la seconde Guerre Mondiale chez un couple de fermiers. Voici le tĂ©moignage saisissant dâune assistante sociale qui lui a rendu visite... 1 Perrin M., Conclusion la force dâune nomination », Affinity therapy Nouvelles recherches sur lâautisme, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 2005, p. 309. 2 Lacan J., Le SĂ©minaire, livre I, Les Ă©crits techniques de Freud, texte Ă©tabli par Miller, Paris, Seuil, 1975, p. 100-101. 3 Grandin T., Ma vie dâautiste, Paris, Odile Jacob, 1994, p. 197. 4 Turcato B., Autodidacte », Affinity therapy Nouvelles recherches sur lâautisme, op. cit., p. 190. Vous n'avez pas encore acquis le numĂ©ro 20 / LES MĂTAMORPHOSES DE LA PUBERTĂ de juillet 2016 et vous ne pouvez consulter qu'une prĂ©sentation de cet article. Pour lire cet article dans son intĂ©gralitĂ©, vous devez acquĂ©rir ce numĂ©ro. Vous aurez alors accĂšs Ă l'ensemble des articles. Me connecter
Retrouvezl'ebook Affinity therapy - Nouvelles recherches sur l'autisme de Myriam Perrin - Ăditeur PU Rennes - Format ePub - Librairie Decitre votre prochain livre est lĂ Apparemment, javascript est dĂ©sactivĂ© sur votre navigateur.1Lâautisme est un trouble neuro-dĂ©veloppemental RogĂ©, 2003, comportemental BarthĂ©lĂ©my, 2012 et hĂ©tĂ©rogĂšne qui affecte la communication, la socialisation et le comportement. Ces trois domaines constituent ce que lâon appelle la triade autistique Wing & Gould, 1979. Dâune maniĂšre plus simple, la nouvelle classification DSM V 2013 a dĂ©fini les troubles du spectre autistique en seulement deux domaines la communication sociale et les comportements restrictifs. Dans la littĂ©rature spĂ©cialisĂ©e, les chercheurs prĂ©fĂšrent parler plutĂŽt des autismes que de lâautisme Ă cause de lâhĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© du syndrome, Ă laquelle se rajoute le caractĂšre unique de chaque individu. En outre, on trouve dĂ©crit dans des rĂ©cits de personnes autistes un certain type de fonctionnement et des difficultĂ©s partagĂ©es perception diffĂ©rente, difficultĂ© Ă gĂ©nĂ©raliser, fascination pour des objets qui tournent ou brillent, stĂ©rĂ©otypies, rĂšgles et routines pour calmer les angoisses et avoir lâimpression de maĂźtriser la situation, peur des Ă©motions, problĂšme de comprĂ©hension et de communication, sentiment de solitude, de diffĂ©rence Chamak, 2005. 2Ce fonctionnement spĂ©cifique est dâautant plus Ă©vident dans lâapprentissage et dans la comprĂ©hension du monde externe, comme en tĂ©moigne Jim Sinclair, adulte atteint dâautisme » Ătre autiste ne signifie pas ĂȘtre incapable dâapprendre. Mais cela signifie quâil y a des diffĂ©rences dans la façon dont lâapprentissage se fait. Les entrĂ©es et les sorties dâinformations peuvent se faire dâune maniĂšre non standard » Sinclair, 1992, p. 295, traduction libre. 3Pour un Ă©lĂšve avec autisme Ă lâĂ©cole, cette maniĂšre de fonctionner diffĂ©remment peut crĂ©er des difficultĂ©s dâordre relationnel, psychologique et intellectuel, pouvant conduire Ă des troubles du comportement devant des situations variĂ©es ainsi que diverses difficultĂ©s scolaires. Or, depuis la loi du 11 fĂ©vrier 2005, la scolarisation en milieu ordinaire doit ĂȘtre favorisĂ©e. Comme en tĂ©moigne StĂ©fany Bonnot-Briey, elle-mĂȘme autiste et travaillant dans la scolarisation des enfants avec autisme le scolariser en milieu scolaire ordinaire supposerait avant tout, connaĂźtre ses limites et ses compĂ©tences afin de pouvoir rĂ©aliser son inclusion dans un milieu scolaire. Il est donc nĂ©cessaire de connaĂźtre son fonctionnement et de se sensibiliser aux approches et aux moyens qui peuvent lui permettre de bĂ©nĂ©ficier au mieux dâune vie dâĂ©lĂšve Ă part entiĂšre » Bonnot-Briey, 2012, p. 3. Ainsi, il sâagit pour les enseignants de rendre accessibles les apprentissages en cernant les besoins particuliers de ce type dâĂ©lĂšves. 4De nombreuses recherches montrent lâintĂ©rĂȘt des TICE Technologies de lâInformation et de la Communication pour lâEnseignement pour les enfants handicapĂ©s Jacquet, 2008, en particulier pour ceux avec autisme Konstantinidis et al., 2009 ; Renaud, 2012. Cependant, toute technique, aussi pertinente soit-elle, ne peut ĂȘtre un outil pĂ©dagogique efficace si elle nâest pas intĂ©grĂ©e aux conceptions et stratĂ©gies pĂ©dagogiques de lâenseignant. 5Adapter son enseignement en utilisant les TICE suppose en effet de la part de lâenseignant, non seulement quâil connaisse les besoins Ă©ducatifs particuliers de ses Ă©lĂšves mais aussi quâil soit ouvert Ă acquĂ©rir de nouvelles compĂ©tences pĂ©dagogiques afin dâadapter son enseignement en utilisant des nouvelles technologies. Comment introduire des TICE de maniĂšre efficace avec les Ă©lĂšves avec autisme quand la diversitĂ© des profils autistiques et des approches pĂ©dagogiques des enseignants est une double source de complexitĂ© ? 6Notre recherche collaborative, impliquant chercheurs et enseignant, vise Ă mettre au jour le processus dâintroduction et dâajustement dâexercices informatisĂ©s en fonction de la singularitĂ© de chaque Ă©lĂšve et de la pratique pĂ©dagogique singuliĂšre de lâenseignante. Dans un premier temps, une revue de littĂ©rature concernant, dâune part, lâutilisation des TICE avec des enfants avec autisme, et dâautre part, les approches pĂ©dagogiques employĂ©es par les enseignants avec ce type dâĂ©lĂšves, est conduite. Les approches thĂ©oriques et mĂ©thodologiques sont ensuite prĂ©sentĂ©es. La mise en Ćuvre de la recherche collaborative est alors dĂ©crite. Une modĂ©lisation de la recherche collaborative est proposĂ©e avant quâen conclusion, quelques perspectives soient finalement indiquĂ©es. 1. Revue de littĂ©rature Utilisation des TICE avec des enfants avec autisme 7Dans le cas de lâautisme, les TICE sont depuis quelques annĂ©es utilisĂ©es en classe ordinaire ou spĂ©cialisĂ©e par les enseignants car elles sâavĂšrent particuliĂšrement adaptĂ©es au profil autistique Machalicek et al., 2010 ; Matson et al.,1993. En effet, les ressources numĂ©riques qui utilisent le son, la vidĂ©o et lâinterface dâune machine â en lâoccurrence lâordinateur â peuvent faciliter lâapprentissage de la communication sociale dâun Ă©lĂšve atteint dâautisme grĂące Ă quelques Ă©lĂ©ments essentiels. Dâabord, un cadre structurĂ© et limitĂ©, qui invite Ă la concentration en lâoccurrence, lâĂ©cran de lâordinateur ; une stimulation par communication multimodale â son, vidĂ©o, image ; un cadre de dĂ©codification de lâinformation plus simple que les Ă©motions humaines ; une manipulation appropriĂ©e ; une autonomie et une autoĂ©valuation plus rapides » Dascalu, 2013. 8La littĂ©rature sur les TICE et lâautisme est abondante et concerne principalement lâentraĂźnement dans des domaines pour lesquels les enfants autistes ont des difficultĂ©s particuliĂšres. Les premiers articles sur lâusage de lâordinateur dans lâĂ©ducation des enfants avec autisme sont dus Ă Colby 1973 avec une Ă©tude pour inciter le langage spontanĂ© par lâĂ©criture dâune lettre sur lâordinateur et le son simultanĂ© de la lettre par lâordinateur ; Panyan 1984, Ă travers une revue de littĂ©rature, montre comment lâordinateur peut stimuler lâattention et lâinteraction chez les enfants avec autisme. La prĂ©sentation de lâinformation dâune maniĂšre visuelle Bondy & Frost, 1994 ; Whalen et al., 2010 encourage lâapprentissage, favorise la concentration des jeunes avec autisme, diminue lâangoisse et oriente lâĂ©lĂšve vers une attention cadrĂ©e sur son objectif Ă©ducatif en Ă©vitant la difficultĂ© de gĂ©rer les interactions avec lâenseignant. Les TICE peuvent ĂȘtre intĂ©grĂ©es dans lâenseignement directement dans la classe ordinaire ou spĂ©cialisĂ©e, soit pour dĂ©velopper des compĂ©tences spĂ©cifiques dans des ateliers variĂ©s sur des diffĂ©rents lieux de prise en charge activitĂ©s scolaires, extrascolaires, ateliers dans des institutions. 9De nombreux programmes relĂšvent de ce quâon appelle computer aided instruction » CAI, quâil sâagisse dâapproches individualisĂ©es ou en groupe, pour faciliter lâapprentissage dans des domaines divers Golan & Baron-Cohen, 2006 ; La Cava et al.,2007, 2010 ; Silver & Oakes, 2001 ; Grynzspan et al., 2007, 2008 ; Ploog et al., 2013 ; Hourcade et al., 2012 ; Ayres et al., 2013 ; Coldwel, 1991a, 1991b. Les recherches de Heimann et al., 1995 et dâautres recherches comme celle de Whalen et al., 2010 sont comparatives. Cette derniĂšre Ă©tude a montrĂ© lâavantage des CAI par rapport Ă un apprentissage traditionnel pour la comprĂ©hension des Ă©motions et lâexpression du langage. 10Au niveau strictement scolaire, lâĂ©criture, la lecture et lâacquisition du vocabulaire ont Ă©tĂ© des objectifs particuliĂšrement visĂ©s dans les Ă©tudes Ramdoss et al., 2011 ; Pennington, 2010. Certaines recherches portent sur la comprĂ©hension et la construction des phrases Basil & Reyes, 2003, dâautres sur le vocabulaire et lâidentification des images Bosseler & Massaro, 2003 ; Colemann-Martin et al., 2005 encore dâautres sur la communication, la lecture, lâexpression verbale et les compĂ©tences phonologiques Heimann et al., 1995 ; Da Silva et al., 2011, la lecture des mots dans un temps limitĂ© Williams et al., 2002, le langage expressif, rĂ©ceptif et les compĂ©tences cognitives scolaires Whalen et al., 2010. 11De lâensemble de ces travaux ressort que la diversitĂ© dâoutils, dâapplications dans divers domaines, devrait faciliter lâhabitude dâintĂ©grer dans lâenseignement ordinaire et spĂ©cialisĂ© les TICE et par consĂ©quent de permettre aux enseignants de crĂ©er des stratĂ©gies Ă©ducatives en concordance avec ces outils. Si les recherches citĂ©es prĂ©cĂ©demment montrent lâintĂ©rĂȘt des TICE pour dĂ©velopper diverses compĂ©tences chez les enfants avec autisme, les outils numĂ©riques utilisĂ©s ne sont pas Ă©laborĂ©s en fonction de la singularitĂ© de chaque enfant mais en fonction dâun Ă©lĂšve autiste gĂ©nĂ©rique et des savoirs gĂ©nĂ©raux sur lâautisme Aresti-Bartolome & Garcia-Zapirain, 2014. De plus, aucune mention quant Ă lâusage de lâoutil par un praticien au regard de sa pratique globale nâest donnĂ©e. 12Or, si la prĂ©occupation est lâintĂ©gration des TICE dans les activitĂ©s scolaires pour les Ă©lĂšves avec autisme, une attention particuliĂšre aux pratiques des enseignants doit ĂȘtre prĂ©sente. Il sâagit Ă©galement de considĂ©rer si, au-delĂ de lâĂ©tiquette autisme, la singularitĂ© de chaque Ă©lĂšve est mise en avant par ces enseignants. 13Voyons donc, mĂȘme au-delĂ des TICE, quelles sont les pratiques dĂ©clarĂ©es des enseignants français qui travaillent avec des Ă©lĂšves avec autisme. Pratiques pĂ©dagogiques et autisme 14Une recherche Baghdadli et al., 2011 permet de faire le point sur les pratiques dĂ©clarĂ©es des enseignants qui travaillent avec des Ă©lĂšves avec autisme. Il est intĂ©ressant de noter que les enseignants ont, de trĂšs loin, pour objectif premier la socialisation, lâautonomisation des Ă©lĂšves avec autisme, et non les apprentissages scolaires. Les compĂ©tences des Ă©lĂšves sur lesquelles sâappuient les enseignants sont principalement la mĂ©moire visuelle et lâapprentissage par imitation. Ils mettent en avant, au niveau des problĂšmes rencontrĂ©s, le manque dâattention et de concentration, des difficultĂ©s au niveau du comportement et les difficultĂ©s sur le plan de la socialisation. 2 Classe pour lâInclusion Scolaire. 3 UnitĂ© LocalisĂ©e pour lâInclusion Scolaire. 15Sâils sâappuient sur des connaissances gĂ©nĂ©rales sur lâautisme, une Ă©crasante majoritĂ© dâenseignants prĂ©tend utiliser des stratĂ©gies pĂ©dagogiques particuliĂšres pensĂ©es pour chaque Ă©lĂšve, en adaptant les consignes ou en mettant en Ćuvre, notamment en ce qui concerne les enseignants spĂ©cialisĂ©s, des emplois du temps individualisĂ©s et des supports visuels favorisant la communication. Les activitĂ©s sont plus courtes, davantage dĂ©composĂ©es que pour les Ă©lĂšves ordinaires. Des adaptations en termes de temps supplĂ©mentaire ou dâun systĂšme dâĂ©valuation spĂ©cifique sont particuliĂšrement utilisĂ©es en CLIS2ou en ULIS3. 16Le travail de thĂšse de lâun dâentre nous Garnier, 2013, au niveau des enseignants spĂ©cialisĂ©s travaillant avec des Ă©lĂšves avec autisme, permet de saisir quâĂ©tant donnĂ©s les profils variĂ©s des Ă©lĂšves, les enseignants optimisent leur action pĂ©dagogique non en employant un prĂȘt-Ă -porter pĂ©dagogique pour Ă©lĂšves avec autisme » mais cherchent Ă adapter leurs pratiques pĂ©dagogiques en fonction des besoins Ă©ducatifs particuliers de chacun. Câest dâailleurs la mĂȘme dĂ©marche que nous avons trouvĂ©e dans les quelques mĂ©moires professionnels dâenseignants consacrĂ©s Ă lâutilisation pĂ©dagogique des TICE en France avec des Ă©lĂšves avec autisme par exemple Bart-PrĂ©vost, 2012. 17Ă lâissue de cette double revue de littĂ©rature, nous Ă©mettons lâhypothĂšse que certaines TICE seront davantage employĂ©es par les enseignants travaillant avec des Ă©lĂšves avec autisme si elles permettent, en plus dâune adĂ©quation avec un profil autistique gĂ©nĂ©ral, une adaptation aux besoins de chaque Ă©lĂšve. Une collaboration entre chercheurs spĂ©cialistes des TICE et enseignants spĂ©cialistes de leurs Ă©lĂšves » nous a semblĂ© une voie pertinente pour dĂ©velopper efficacement lâusage des TICE avec des Ă©lĂšves avec autisme dans le cadre scolaire. Pour ce faire, une recherche collaborative utilisant un logiciel permettant une trĂšs forte personnalisation des activitĂ©s a Ă©tĂ© menĂ©e. 2. Approche thĂ©orique La recherche collaborative 18DesgagnĂ© et ses collĂšgues parlent de recherche collaborative pour dĂ©signer des pratiques associant recherche et formation 1997, 2001. En reprenant Lieberman 1986, il sâagit de faire, pour les divers courants sâinscrivant dans cette dĂ©marche, de la recherche avec et non sur les enseignants. Le chercheur incite le praticien Ă avoir de la rĂ©flexivitĂ© sur ce quâil fait. Le savoir dâexpĂ©rience est ainsi mis en valeur, le dĂ©veloppement professionnel souhaitĂ©. La recherche collaborative rĂ©pond Ă©galement Ă la critique selon laquelle la recherche universitaire serait Ă©loignĂ©e de la pratique ; elle a pour ambition justement de rapprocher thĂ©orie et pratique, savoirs savants et savoirs dâaction. Chercheurs et enseignants explorent ensemble certains aspects de la pratique, et participent Ă une co-construction de savoirs. 19La co-construction est dâailleurs selon DesgagnĂ© 1997 autant la rĂ©sultante de la sensibilitĂ© thĂ©orique » du chercheur que de lâexpĂ©rience pratique » du praticien. Si la recherche collaborative peut se mener de maniĂšres trĂšs diverses, adopter des approches thĂ©oriques diffĂ©rentes, nous allons nous situer dans la lignĂ©e des travaux de DesgagnĂ© en adoptant lâapproche de la thĂ©orie ancrĂ©e. Une recherche collaborative fondĂ©e sur la singularitĂ© 20Notre recherche collaborative est en phase avec ce que lâon peut appeler la triade de lâenseignement spĂ©cialisĂ© singularitĂ©, fonctionnement et besoin, triade suggĂ©rĂ©e par Benoit 2012. Or, lâemploi de certains termes a au fil du temps engendrĂ© des reprĂ©sentations, dâoĂč dĂ©coulaient des stratĂ©gies pĂ©dagogiques qui pouvaient ĂȘtre stigmatisantes. Par exemple, la nuance sĂ©mantique entre diffĂ©rence et singularitĂ© peut conduire Ă deux modes de scolarisation des Ă©lĂšves avec handicap, lâune relevant du paradigme de lâintĂ©gration, pour lequel câest Ă lâĂ©lĂšve de faire lâeffort de sâintĂ©grer versus le paradigme de lâinclusion, le systĂšme Ă©ducatif sâadaptant alors Ă la singularitĂ© de lâĂ©lĂšve. Ensuite, penser en termes de fonctionnement amĂšne Ă sâintĂ©resser Ă la structure globale psychique et comportementale de lâĂ©lĂšve et non seulement Ă la dĂ©ficience qui amĂšne Ă voir lâĂ©lĂšve en Ă©lĂ©ments sĂ©parĂ©s, juxtaposĂ©s Benoit & Sagot, 2008. Une troisiĂšme opposition concerne trouble et besoin. Le terme de trouble fonde une dĂ©marche pĂ©dagogique qui lui devient constitutive, alors que le terme de besoin incite Ă identifier les obstacles Ă lâapprentissage de chaque Ă©lĂšve. 4 Nous comprenons ici par style cognitif une certaine maniĂšre de fonctionner du point de vue cognitif ... 21Ainsi, si nous considĂ©rons le couple des termes trouble/besoin, deux maniĂšres diffĂ©rentes de considĂ©rer lâautisme peuvent ĂȘtre envisagĂ©es lâautisme en tant que trouble envahissant /cognitif et lâautisme en tant que style cognitif4, diffĂ©rent du style standard, se dĂ©clinant de maniĂšre singuliĂšre pour chaque individu porteur dâautisme. Cette singularitĂ© peut sâavĂ©rer ĂȘtre fonctionnelle Ă condition dâadapter lâenvironnement Ă ce type de public. 22Notre recherche collaborative sur les TICE se situe dans une optique diffĂ©rente de la majoritĂ© des travaux concernant lâusage des TICE avec les enfants avec autisme. Effectivement, dans la plupart de ces Ă©tudes, les applications et leur intĂ©rĂȘt par rapport Ă la population considĂ©rĂ©e sont pensĂ©s Ă travers les troubles, les manques des personnes avec autisme. Ă lâinverse de ces Ă©tudes basĂ©es exclusivement sur des gĂ©nĂ©ralitĂ©s concernant lâautisme, notre recherche prend en compte le profil cognitif spĂ©cifique de chaque Ă©lĂšve dans la classe, son projet pĂ©dagogique individuel et la pratique dâenseignement particuliĂšre Ă©galement. Tenir compte de chaque profil spĂ©cifique ne suppose pas du tout de crĂ©er des exercices distinctifs pour chaque enfant, mais de crĂ©er des exercices qui englobent une architecture rĂ©pondant Ă la singularitĂ© cognitive de chaque Ă©lĂšve autiste concernĂ©. Ă cela, nous avons adoptĂ© Ă©galement une stratĂ©gie personnalisĂ©e, dans lâexpĂ©rimentation qui implique dâune part, le choix de certains exercices pour tel Ă©lĂšve et dâautre part, une progression des exercices adaptĂ©s au projet pĂ©dagogique individualisĂ© de chaque enfant. Il est important ici de souligner que tout projet pĂ©dagogique individualisĂ© est conçu non seulement en fonction du projet dâapprentissage liĂ© au niveau scolaire de lâĂ©lĂšve autiste mais aussi en fonction de son profil cognitif autistique singulier. 23Aussi, notre prĂ©occupation dans la recherche collaborative est, Ă partir de la singularitĂ© cognitive et des besoins Ă©ducatifs de chaque Ă©lĂšve avec autisme, de comprendre en quoi et comment des activitĂ©s pĂ©dagogiques sur support informatique peuvent permettre de le mobiliser et de dĂ©velopper ses compĂ©tences. La thĂ©orie ancrĂ©e 24La thĂ©orie ancrĂ©e, ou thĂ©orie enracinĂ©e Grounded Theory est une approche scientifique Ă©laborĂ©e dans les annĂ©es 60 par des sociologues pour marquer une alternative par rapport aux approches classiques positivistes. Glaser et Strauss 1967 souhaitent proposer une autre maniĂšre de faire de la recherche pour favoriser lâinnovation scientifique, la crĂ©ation de nouvelles thĂ©ories. Ils inversent la dĂ©marche hypothĂ©tico-dĂ©ductive en thĂ©orisant seulement dans un deuxiĂšme temps, le premier pas Ă©tant consacrĂ© Ă lâexamen attentif des donnĂ©es brutes. PrivilĂ©giant en cela une approche inductive, la thĂ©orie doit Ă©merger des donnĂ©es, et nâest quâun aboutissement, pas un prĂ©alable. Câest une dĂ©marche de thĂ©orisation » PaillĂ©, 1994 dans laquelle il sâagit de lier dans un schĂ©ma explicatif diffĂ©rents Ă©lĂ©ments dâune situation. Ce qui relĂšve du gĂ©nĂ©ral sâajuste peu Ă peu aux donnĂ©es singuliĂšres de lâenquĂȘte. Les chercheurs interprĂštent ainsi progressivement leurs donnĂ©es, dans un aller-retour constant entre celles-ci et les premiĂšres tentatives de catĂ©gorisation et de mise en sens. Lâenjeu est de se laisser surprendre par la singularitĂ© des donnĂ©es du terrain, et dâĂ©viter de forcer le rĂ©el Ă entrer dans des catĂ©gories, des thĂ©ories dĂ©jĂ Ă©tablies. Le retour constant aux donnĂ©es, voire lâappel Ă de nouvelles donnĂ©es, permettent de confirmer les premiĂšres constructions thĂ©oriques que le chercheur a Ă©laborĂ©es, ou Ă©ventuellement de les infirmer et donc de les adapter aux observations rĂ©alisĂ©es. Si lâobjet de recherche est certes entrevu dĂšs le dĂ©part on a bien une certaine idĂ©e de ce sur quoi on veut enquĂȘter, celui-ci nâest pas pleinement dĂ©fini au dĂ©but de la recherche, et peut Ă©voluer en partie en fonction de ce qui sera relevĂ© du terrain il relĂšve ainsi davantage dâun territoire Ă explorer » Guillemette, 2006. 3. Aspects mĂ©thodologiques Cadre de lâexpĂ©rimentation 5 Seul lâun dâentre nous est allĂ© sur le terrain chercheur 1. Lâautre chercheur chercheur 2 a co- ... 25Notre expĂ©rimentation5 a eu lieu dans une CLIS spĂ©cialisĂ©e autisme, accueillant exclusivement des Ă©lĂšves ayant Ă©tĂ© diagnostiquĂ©s autistes, dans laquelle une enseignante spĂ©cialisĂ©e travaille accompagnĂ©e dâune Ă©ducatrice spĂ©cialisĂ©e. Nos sĂ©ances dâobservations et expĂ©rimentation quatre ont eu lieu pendant environ vingt heures. 26Les quatre enfants observĂ©s sont des Ă©lĂšves avec autisme ĂągĂ©s entre 7 et 9 ans, qui ont accĂšs Ă la communication par le verbal et les pictogrammes. Nos deux sĂ©ances dâobservation ont permis de nous introduire progressivement parmi les enfants, pour qui une prĂ©sence Ă©trangĂšre crĂ©e de nouvelles craintes. Ces deux sĂ©ances dâobservation et dâĂ©change avec lâenseignante et lâĂ©ducatrice spĂ©cialisĂ©e ont permis dâavoir quelques idĂ©es dâexercices qui devaient ĂȘtre en accord avec les projets personnalisĂ©s de ces Ă©lĂšves, notamment avec les objectifs pĂ©dagogiques et leurs profils cognitifs. 27AprĂšs deux sĂ©ances dâobservation, nous avons commencĂ© Ă prĂ©senter aux Ă©lĂšves les exercices dĂ©jĂ existants sur le logiciel utilisĂ© labyrinthe, calcul addition superposĂ©e sans retenue ; calcul euros, lecture reconstruction de phrase ; colorage des mots, mots intrus groupement association formes et couleurs, discrimination visuelle, images Ă mettre dans lâordre, numĂ©ration, reconstruction images. Pratiques professionnelles de lâenseignante spĂ©cialisĂ©e 28Les caractĂ©ristiques des pratiques de lâenseignante indiquĂ©es ici sont issues des entretiens que nous avons eus avec elle ainsi que de lâobservation en classe. 6 Applied Behavior Analysis Analyse appliquĂ©e du comportement. La stratĂ©gie Ă©ducative est centrĂ©e s ... 7 Treatment and Education of Autistic and related Communication handicapped Children TEACCH est un ... 8 La pĂ©dagogie Montessori est basĂ©e sur une Ă©ducation sensorielle et kinesthĂ©sique. 9 La pĂ©dagogie Freinet est fondĂ©e sur des techniques novatrices. Le principe essentiel de cette pĂ©dag ... 29Lâenseignante spĂ©cialisĂ©e de la CLIS Autisme est dans une continuelle recherche des mĂ©thodes Ă©ducatives et pĂ©dagogiques qui pourraient aider ses Ă©lĂšves Ă progresser. Elle sâinspire dans ses activitĂ©s quotidiennes de plusieurs mĂ©thodes Ă©ducatives ABA6, TEACCH7 et pĂ©dagogiques de type Montessori8, Freinet9. 30Les aspects essentiels de ces approches Ă©ducatives se retrouvent dans lâergonomie des exercices créés sur GĂ©nex par le chercheur 1. 10 Un renforçateur, dans lâapproche Ă©ducative ABA, est une forme de rĂ©compense du travail effectuĂ© par ... 31Si le travail individuel est privilĂ©giĂ©, elle prĂ©voit Ă©galement des temps de regroupement pour aider la socialisation et favoriser la comprĂ©hension globale de ce qui est vĂ©cu. Elle met en place des classeurs de pictogrammes, des sĂ©ances de travail sĂ©quentielles, des renforçateurs pour rĂ©compenser le travail10. Outil informatique utilisĂ© 32Les applications informatiques Ă©voquĂ©es dans la littĂ©rature sur les TICE et lâautisme, si elles peuvent ĂȘtre paramĂ©trables, ont une structure dĂ©finie par les concepteurs qui ne peut ĂȘtre modifiable par les utilisateurs. A contrario, le logiciel GĂ©nex, conçu par Sagot et Durand 2004 que nous avons utilisĂ©, permet la crĂ©ation dâexercices trĂšs personnalisĂ©s. 33GĂ©nex prĂ©sente deux modes de fonctionnement le mode prĂ©paration, qui permet Ă lâenseignant de crĂ©er ses propres applications pĂ©dagogiques et de les modifier par la suite, et le mode travail, qui permet Ă lâutilisateur de travailler sur les exercices créés antĂ©rieurement. Lâorganisation de GĂ©nex est basĂ©e sur la notion dâobjet. En effet, rĂ©aliser une activitĂ© avec GĂ©nex consiste Ă ranger sur lâĂ©cran diffĂ©rents objets, auxquels on donne diffĂ©rentes propriĂ©tĂ©s, avec lesquels on crĂ©e des relations entre les uns et les autres, ce qui explique la grande variĂ©tĂ© possible des exercices de GĂ©nex. Il y a six types dâobjets Ă©tiquettes, textes, Ă©diteurs, sons, images, boutons dâactions. Ces objets permettent dâagir sur des images, des sons de synthĂšse vocale ou enregistrĂ©s. Lâanimation et lâinteractivitĂ© sont possibles grĂące Ă des boutons dâaction qui dĂ©clenchent des actions en crĂ©ant ainsi une dynamique pĂ©dagogique. Les objets peuvent ĂȘtre dĂ©placĂ©s, redimensionnĂ©s, empilĂ©s. Chaque objet possĂšde plusieurs propriĂ©tĂ©s spĂ©cifiques qui peuvent ĂȘtre changĂ©es en fonction de lâobjectif pĂ©dagogique Ă atteindre. 34GĂ©nex est donc une boĂźte Ă outils pĂ©dagogique, Ă©ducative et rééducative pour de multiples apprentissages, qui, si elle a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©e initialement principalement pour des Ă©lĂšves porteurs de handicap moteur, peut Ă©galement servir aux enfants valides, et Ă©galement adaptable Ă lâautisme Dascalu, 2011 Ă©tant donnĂ©e la possibilitĂ© de crĂ©er des exercices sur mesure Ă partir des diffĂ©rents types dâobjets. Entre autres, GĂ©nex permet une personnalisation des objets, on peut introduire des sons, des images, de lâĂ©crit et faire ainsi des exercices personnalisĂ©s Ă un enfant ou Ă un groupe dâenfant. Lâexercice suivant est un exemple. Figure 1 - Exemple dâexercice de reconnaissance du verbe 4. Mise en Ćuvre de la recherche collaborative MĂ©thode de travail avec GĂ©nex dans la CLIS Autisme 35Lâobjectif gĂ©nĂ©ral de lâexpĂ©rimentation a Ă©tĂ© lâadaptation de GĂ©nex Ă lâusage des Ă©lĂšves avec autisme, par la crĂ©ation de nouveaux exercices qui rĂ©pondaient aux besoins cognitifs et Ă©ducatifs des Ă©lĂšves observĂ©s. 36En accord avec ces objectifs, notre travail de terrain a Ă©tĂ© divisĂ© en plusieurs Ă©tapes contact avec lâenseignante spĂ©cialisĂ©e, les Ă©lĂšves et observation de la vie de classe pendant plusieurs sĂ©ances ; mise en Ă©vidence des besoins Ă©ducatifs et cognitifs particuliers de chaque Ă©lĂšve et des objectifs Ă©ducatifs et pĂ©dagogiques suite aux Ă©changes avec les professionnels concernĂ©s lâenseignante spĂ©cialisĂ©e et lâĂ©ducatrice spĂ©cialisĂ©e ; expĂ©rimentation des exercices exemples de GĂ©nex ; conception des exercices dâapprentissage, adaptĂ©s aux profils cognitifs et besoins Ă©ducatifs particuliers des Ă©lĂšves, avec GĂ©nex ; expĂ©rimentation des exercices créés. Partir des besoins Ă©ducatifs et cognitifs particuliers de chaque Ă©lĂšve 37Afin dâeffectuer le travail prĂ©liminaire avec des exercices dĂ©jĂ existants et par la suite concevoir des exercices adaptĂ©s aux besoins Ă©ducatifs particuliers de chaque Ă©lĂšve, nous avons pris, lâenseignante et nous-mĂȘme, en compte plusieurs objectifs en partant de nos propres observations et de celles de lâenseignante telles quâindiquĂ©es dans les projets pĂ©dagogiques des Ă©lĂšves en lecture et Ă©criture, tous les enfants ont dĂ©jĂ travaillĂ© autour dâexercices de catĂ©gorisation et de correspondance son-image. Pour les Ă©lĂšves que nous appellerons Qassim et Ătienne, lâobjectif Ă©tait de travailler et de concevoir des exercices sur le genre et le nombre masculin/fĂ©minin, pluriel/singulier ainsi que de retrouver le verbe dans une phrase simple comme Le chien boit dans sa gamelle », le tout associĂ© toujours Ă une image. Pour les Ă©lĂšves que nous nommerons Noah et Cyrille qui ne sont pas lecteurs pour le moment, il sâagirait dâassocier des mots identiques dans diffĂ©rentes Ă©critures et de lire des groupes de mots avec le capital-mots appris en classe jours de la semaine, couleurs, lexique de lâalimentation courante... en mathĂ©matiques, Qassim connaissant les nombres jusquâĂ 9999, devrait les dĂ©composer, associer, Ă©crire, combiner et trouver tout ce qui fait cent avec un travail combinĂ© sur les retenues pour les additions. Noah et Cyrille connaissant les nombres jusquâĂ 50, devraient les dĂ©composer, associer, Ă©crire et combiner les nombres. 38Suite aux objectifs pĂ©dagogiques visĂ©s et aux principes de conception mentionnĂ©s auparavant nous avons créé les types dâexercices suivants, en utilisant des pictogrammes correspondance son-image ; catĂ©gorisation ; questionnement qui, oĂč, comment. Figure 2 - Correspondance son-image 39La consigne est Ă©crite, mais peut ĂȘtre Ă©galement entendue symbole son droite. On trouve deux symboles pour les sons, un bouton de vĂ©rification le bonhomme qui sourit en cas de rĂ©ussite de lâĂ©lĂšve, et un bouton pour effacer en cas dâerreur. Lâobjectif de lâexercice est dâĂ©couter les sons et de faire la correspondance entre les sons et les images. Les sons renvoient au vent et Ă lâorage. Test des applications conçues en fonction des besoins Ă©ducatifs particuliers des Ă©lĂšves 40Nous avons effectuĂ© une sĂ©ance dâexpĂ©rimentation qui a Ă©tĂ© filmĂ©e par lâenseignante spĂ©cialisĂ©e, sĂ©ance dâune durĂ©e de quinze minutes pour chaque enfant. Les enfants avaient dĂ©jĂ utilisĂ© GĂ©nex dans lâĂ©tape prĂ©liminaire de lâexpĂ©rimentation ils savaient alors comment dĂ©placer un objet dans une boĂźte et vĂ©rifier lâexercice. Nous avons testĂ© pour chaque enfant les exercices qui correspondaient Ă son profil cognitif et Ă ses besoins Ă©ducatifs particuliers, ainsi quâaux objectifs pĂ©dagogiques de lâenseignante. Par exemple, pour Noah, nous avons proposĂ© un exercice de correspondance son-image, lâenfant devrait chercher parmi deux sons, le son correspondant Ă lâimage. Ă la suite de cette expĂ©rimentation, nous avons marquĂ© les Ă©lĂ©ments Ă prendre en compte pour amĂ©liorer la conception de ces exercices afin de mieux rĂ©pondre aux exigences dĂ©jĂ mentionnĂ©es. Par exemple, nous avons proposĂ© de changer le bouton de validation qui Ă©tait peu clair, Ă©galement les consignes des exercices qui Ă©taient inadaptĂ©es au niveau de comprĂ©hension des Ă©lĂšves. Les sĂ©ances filmĂ©es ont fait lâobjet dâun montage sur DVD, ce qui a permis une analyse a posteriori. 5. ThĂ©orisation ancrĂ©e Quelques prĂ©cisions sur la dĂ©marche 41Sâil sâagit de comprendre en quoi les Ă©lĂšves ont pu ĂȘtre mobilisĂ©s, voire progresser grĂące aux applications sur GĂ©nex, notre thĂ©orisation concerne lâensemble de la dĂ©marche de recherche collaborative et a pour visĂ©e de donner de lâintelligibilitĂ© au processus par lequel un outil informatique peut sâintĂ©grer dans la dĂ©marche pĂ©dagogique de lâenseignant travaillant avec des Ă©lĂšves avec autisme. 42Le chercheur 1, a pris rĂ©guliĂšrement des notes aussi bien concernant les observations des Ă©lĂšves quâau sujet des entretiens menĂ©s avec lâenseignante et lâĂ©ducatrice spĂ©cialisĂ©e. Des rĂ©flexions, idĂ©es liĂ©es Ă lâĂ©laboration dâapplications pour GĂ©nex ont Ă©tĂ© notĂ©es au fur et Ă mesure Ă chaque moment de lâexpĂ©rience, aussi bien en observation en classe, que lors des essais avec les exercices dĂ©jĂ prĂȘts Ă lâemploi de GĂ©nex, que lors de la derniĂšre passation avec les exercices créés spĂ©cifiquement pour les Ă©lĂšves. Des observations concernant les rĂ©actions des Ă©lĂšves, leurs rĂ©ussites par rapport aux exercices ont Ă©tĂ© notĂ©es. 43Le chercheur 2 a, dans un premier temps, rĂ©alisĂ© un codage proche du texte original du chercheur 1. Dans un second temps, un deuxiĂšme codage davantage conceptuel a Ă©tĂ© Ă©laborĂ©, certains des codes de dĂ©part Ă©tant englobĂ©s dans un code plus gĂ©nĂ©ral, comme le suggĂšrent les auteurs de la thĂ©orie ancrĂ©e. Lâhistoire de la recherche a Ă©tĂ© reconfigurĂ©e par un rĂ©cit mis en intrigue Ă partir de ces concepts Ă©laborĂ©s exemple de concept lâordinateur comme objet de fascination et dâexcitation ». Finalement, pour lâĂ©laboration de la modĂ©lisation thĂ©orique, le chercheur 2 a dĂ©gagĂ©, grĂące Ă sa sensibilitĂ© thĂ©orique et en suivant la dĂ©marche de la thĂ©orie ancrĂ©e, câest-Ă -dire, de conceptualisation progressive, le concept de singularitĂ©. En effet, ce concept qui a Ă©mergĂ© globalement de lâensemble des donnĂ©es, a Ă©tĂ© dĂ©clinĂ© en trois aspects lâun sur le logiciel, lâautre sur le profil des Ă©lĂšves et le dernier sur lâapproche pĂ©dagogique de lâenseignante. Puis le chercheur 2 est allĂ© plus loin dans la thĂ©orisation et a Ă©laborĂ© une modĂ©lisation de lâensemble de la recherche collaborative, quâil a soumise au chercheur 1 jusquâĂ obtenir un consensus. Mise en intrigue de la recherche collaborative Une immersion dans une classe surprenante 44Si lâenseignante a mis en place plusieurs moyens, des stratĂ©gies pĂ©dagogiques et Ă©ducatives, liĂ©es aux caractĂ©ristiques de lâautisme, pour aider ses Ă©lĂšves Ă Ă©voluer, lâattention du chercheur 1 est attirĂ©e par un certain nombre dâadaptations pĂ©dagogiques lâespace structurĂ©, lâusage des pictogrammes, lâemploi du temps ritualisĂ© qui donne un rythme de vie Ă lâenfant. La comprĂ©hension des consignes est facilitĂ©e par des dessins simples sur le tableau ou sur une feuille, lâexpression verbale des Ă©lĂšves est favorisĂ©e par la prononciation du dĂ©but des mots par la maĂźtresse. Cette derniĂšre utilise du matĂ©riel concret pour apprendre Ă compter, met en place des ateliers de repĂ©rage dans le temps les jours de la semaine, les saisons. Le chercheur 1 remarque Ă©galement la gestion pĂ©dagogique trĂšs individualisĂ©e des Ă©lĂšves. Chacun fait ce quâil a Ă faire ; peu de contacts ont lieu entre eux. Les interactions sâĂ©tablissent quand lâun dâeux fait du bruit et perturbe lâautre, prend les jouets de quelquâun dâautre ou sort de son rituel habituel. Le chercheur 1 est surpris par la grande sensibilitĂ© des Ă©lĂšves Ă la rĂ©ussite ou Ă lâĂ©chec joie trĂšs intense, et au contraire manifestation dâune grande peur de lâĂ©chec, aux fĂ©licitations et Ă la reconnaissance de leurs compĂ©tences dans les tĂąches demandĂ©es. Lâordinateur objet de fascination et dâexcitation 45Le chercheur 1 remarque Ă©galement que lâordinateur de la classe exerce une attraction sur les enfants avec autisme. Elle note la maniĂšre avec laquelle lâusage de lâordinateur peut aider lâĂ©lĂšve dans lâaccomplissement des tĂąches et comment il peut augmenter la rĂ©ussite de lâĂ©lĂšve par diminution du dĂ©ficit dâattention et par lâaugmentation de la concentration. Lâordinateur gĂ©nĂšre en outre beaucoup dâĂ©motions une surexcitation quand les Ă©lĂšves lâutilisent comme pour Qassim et Cyrille, une grande stimulation gestuelle quand ils voient des mouvements des personnages virtuels sur lâĂ©cran Qassim ou une rĂ©action de rĂ©pĂ©tition verbale Noah. Un profil dâenseignante favorisant lâintroduction de GĂ©nex 46En Ă©changeant avec lâenseignante, celle-ci dit quâelle sâest rendu compte des grands avantages quâoffre lâusage de lâordinateur pour ces enfants, et essaye dâutiliser au maximum lâordinateur ; dans ce sens, elle se montre trĂšs ouverte Ă lâidĂ©e de conception des exercices avec GĂ©nex adaptĂ©s aux profils de chaque Ă©lĂšve. Influence de lâapproche pĂ©dagogique de lâenseignante sur les applications GĂ©nex 47Lâobservation des Ă©lĂšves ainsi que les Ă©changes avec lâenseignante incitent Ă la modification des activitĂ©s de base de GĂ©nex le bouton vĂ©rification de la rĂ©ponse Ă lâexercice » sous lâaspect dâune tĂȘte de bonhomme qui sourit est peu clair pour un enfant avec autisme. En Ă©changeant avec lâenseignante, la nĂ©cessitĂ© dâadapter les consignes en utilisant des pictogrammes ou des messages vocaux, de crĂ©er des images plus grandes et dâavoir moins de boutons Ă lâĂ©cran semble sâimposer pour certains Ă©lĂšves. En effet ces adaptations apportĂ©es dans les exercices créés relĂšvent dâune approche dâapprentissage structurĂ©, visuel et concret, tel que prĂ©sente dans les mĂ©thodes pĂ©dagogiques et Ă©ducatives employĂ©es par lâenseignante et qui par ailleurs rĂ©pondent au profil cognitif et besoins Ă©ducatifs particuliers de lâĂ©lĂšve avec autisme. Des constats incitants Ă des ajustements 48Concernant les rĂ©sultats individuels des enfants, le chercheur 1 observe les points suivants. Pour Qassim les exercices proposĂ©s sont facilement rĂ©solus. Aucune difficultĂ© nâest observĂ©e dans la mise en correspondance des images et des sons. En revanche, lâexpression orale suscitĂ©e par lâexercice de correspondance des phrases complĂštes sâavĂšre ĂȘtre compliquĂ©e pour lâĂ©lĂšve. Pour Noah il est difficile dâaccomplir les exercices notamment en raison dâun langage Ă©cholalique, qui ne lui permet pas de se concentrer sur la tĂąche en soi, mĂȘme sâil connaĂźt bien les rĂ©ponses et fait bien la mise en correspondance des images et des sons. Pour Cyrille lâexercice de catĂ©gorisation de plusieurs objets est compliquĂ© ; Cyrille a des difficultĂ©s Ă comprendre les consignes alors que lâexercice de correspondance est rĂ©ussi par lâĂ©lĂšve. Ătienne connaĂźt des difficultĂ©s quand les exercices de catĂ©gorisation se complexifient nombreux objets. 49Toutes ces observations ont bien aidĂ© le chercheur 1 et lâenseignante Ă percevoir quels Ă©lĂ©ments devraient ĂȘtre changĂ©s Ă la fois dans la conception des exercices ainsi que dans la mĂ©thode dâapprentissage et dâexpĂ©rimentation. Des amĂ©liorations possibles qui vont parfois au-delĂ de lâapplication en elle-mĂȘme 50Concernant lâergonomie du logiciel GĂ©nex, elle rĂ©pond globalement bien, selon le chercheur 1, aux besoins des enfants avec autisme de la classe par exemple au niveau des exercices de correspondance entre son et image. 51La crĂ©ation dâexercices personnalisĂ©s a Ă©tĂ© prĂ©cĂ©dĂ©e par un travail avec chaque enfant sur des exercices anciens de GĂ©nex qui nâĂ©taient pas adaptĂ©s Ă leurs profils dans le but de voir la capacitĂ© de travail sur certains objectifs catĂ©gorisation, comptage, classification. Cela a rendu possible une crĂ©ation des exercices qui a rĂ©pondu Ă la fois Ă des besoins cognitifs et Ă©ducatifs individuels ainsi quâĂ une adaptation globale de groupe. Finalement, le chercheur a proposĂ© dans le cadre de lâexpĂ©rimentation des exercices plus difficiles pour Qassim par exemple davantage dâimages Ă trier conceptuellement, davantage dâimages Ă faire correspondre aux sons, et moins difficiles pour les autres Ătienne, Cyrille, Noah. En plus, lâexpĂ©rimentation de ces exercices a dĂ©butĂ© pour les trois derniers enfants avec des exercices plus faciles de GĂ©nex classification des formes dĂ©jĂ utilisĂ©s par les enfants pour quâils soient dans une approche dâapprentissage basĂ©e sur lâencouragement â qui va du facile au plus difficile. 52En outre, lâapproche pĂ©dagogique de lâenseignante irrigue les nouvelles idĂ©es du chercheur 1 pour crĂ©er de nouvelles applications. Sâil est constatĂ© que les enfants ont eu des difficultĂ©s avec certains exercices ainsi quâavec la comprĂ©hension des consignes, qui Ă©taient trop compliquĂ©es pour eux, lâutilisation des pictogrammes pour exprimer les consignes et les simplifier semble ĂȘtre la bonne voie. Globalement, au niveau du contenu pĂ©dagogique, les exercices sont considĂ©rĂ©s par lâenseignante et le chercheur 1 comme bien adaptĂ©s aux besoins de chacun des Ă©lĂšves. En revanche, un exercice de catĂ©gorisation des animaux de la ferme est jugĂ© trop compliquĂ© pour tous, par contre dâautres exercices se sont rĂ©vĂ©lĂ©s ĂȘtre difficiles seulement pour certains dâentre eux Noah, Etienne. Nous avons observĂ© Ă la suite de ces exercices quâil y a des besoins manifestĂ©s par tous ces Ă©lĂšves autistes, mais Ă©galement des besoins cognitifs et pĂ©dagogiques relevant de la singularitĂ© de chaque Ă©lĂšve. 53Le chercheur 1 prend Ă©galement conscience de certaines insuffisances au niveau de documents explicatifs concernant les applications créées pour certains Ă©lĂšves. Si les consignes des exercices ont Ă©tĂ© conçues pour aider chaque enfant avec autisme Ă comprendre ce quâon lui demande de faire, en revanche, lâabsence dâune fiche technique individualisĂ©e spĂ©cifiant des explications complĂ©mentaires pour chaque Ă©lĂšve, a engendrĂ© quelques difficultĂ©s. 54Au-delĂ de lâaspect technique, le chercheur 1 se remet en cause quant Ă sa maniĂšre dâĂȘtre avec les Ă©lĂšves, malgrĂ© son expĂ©rience de travail avec ce type de public et malgrĂ© les observations dĂ©jĂ faites auparavant dans la classe. Elle pense quâelle a employĂ© trop de paroles, dâexplications et que sa tonalitĂ© de voix Ă©tait trop chargĂ©e Ă©motionnellement pour un contact avec ces enfants avec autisme. Un consensus final entre le chercheur 1 et lâenseignante 55MalgrĂ© quelques rĂ©serves de lâenseignante concernant certaines limites techniques de GĂ©nex, par exemple de ne pas pouvoir faire glisser les images sur lâĂ©cran, elle convient de lâintĂ©rĂȘt des applications créées spĂ©cifiquement par rapport au profil cognitif et aux besoins Ă©ducatifs particuliers de ses Ă©lĂšves. ModĂ©lisation finale 56Si la dĂ©marche de recherche collaborative a optĂ© pour la singularitĂ© vs. la gĂ©nĂ©ralitĂ©, câest ce terme que nous avons retenu pour dĂ©finir, dâun point de vue thĂ©orique, trois pĂŽles ayant exercĂ© une influence majeure sur le dĂ©roulement de la recherche la singularitĂ© de lâergonomie de lâapplication, la singularitĂ© des profils cognitifs et besoins Ă©ducatifs particuliers de chaque Ă©lĂšve, la singularitĂ© de la pratique pĂ©dagogique de lâenseignante. 57Chaque moment de la recherche a Ă©tĂ© influencĂ© par plusieurs de ces pĂŽles. 58Les nĂ©gociations entre enseignante et chercheur 1 concernant les objectifs partagĂ©s objectifs dâamĂ©lioration dâune pratique et objectifs de recherche lors de la premiĂšre rencontre entre le chercheur 1 et lâenseignante spĂ©cialisĂ©e ont Ă©tĂ© inflĂ©chies par la singularitĂ© de la pratique pĂ©dagogique de lâenseignante elle souhaitait enrichir sa pratique et non pas adopter une approche clĂ© en main » qui lui Ă©tait totalement Ă©trangĂšre et la singularitĂ© de lâergonomie de lâapplication les applications ont leurs propres spĂ©cificitĂ©s prĂ©sentation visuelle, modalitĂ©s dâinteractions. 59Le chercheur 1 a testĂ© les applications de base de GĂ©nex avec les Ă©lĂšves et a observĂ© les rĂ©actions des enfants. Ces observations sont influencĂ©es par la singularitĂ© de lâergonomie de lâapplication et la singularitĂ© des profils cognitifs et besoins Ă©ducatifs particuliers des Ă©lĂšves. 60Suite aux premiĂšres observations en classe et Ă la lecture des projets pĂ©dagogiques de lâenseignante, des idĂ©es ont Ă©mergĂ© chez le chercheur 1 pour crĂ©er des applications adaptĂ©es inspirations issues de la singularitĂ© des pratiques et de la singularitĂ© des profils cognitifs. 61Une fois les applications personnalisĂ©es et adaptĂ©es créées, ces derniĂšres ont Ă©tĂ© testĂ©es avec les Ă©lĂšves. Lâenregistrement vidĂ©o de ces tests permet au chercheur 1 de visionner plusieurs fois les sĂ©ances et de voir la mobilisation, les rĂ©ussites et les difficultĂ©s des Ă©lĂšves avec chaque application personnalisĂ©e singularitĂ© des profils cognitifs et besoins Ă©ducatifs particuliers et singularitĂ© de lâergonomie applications. 62Finalement, les trois types de singularitĂ©s entrent en interaction lors du bilan final entre enseignante spĂ©cialisĂ©e et chercheur 1 quant Ă discerner lâintĂ©rĂȘt et les limites des applications Ă©laborĂ©es pour les Ă©lĂšves. Toutefois, ces singularitĂ©s ne peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©es comme Ă©tant de mĂȘme niveau. En effet, la singularitĂ© du profil cognitif de lâĂ©lĂšve est une singularitĂ© premiĂšre, avec une part biologique. La pratique de lâenseignante est fonction des singularitĂ©s des Ă©lĂšves elle se construit progressivement en sâadaptant aux spĂ©cificitĂ©s des enfants avec autisme. La singularitĂ© de lâergonomie de lâapplication dĂ©pend des deux prĂ©cĂ©dents aspects, chaque activitĂ© pĂ©dagogique sur GĂ©nex a Ă©tĂ© bĂątie en fonction de ces aspects dĂ©jĂ mentionnĂ©s. Il sâagit en quelque sorte dâun prolongement numĂ©rique de la singularitĂ© de la pratique pĂ©dagogique de lâenseignante. 6. Conclusion 63Lâobjectif de cette recherche collaborative Ă©tait de comprendre le processus par lequel un outil informatique est introduit dans une classe dâĂ©lĂšves avec autisme, tout en visant une adaptation personnalisĂ©e des applications Ă leurs profils cognitifs et besoins Ă©ducatifs particuliers. Ces aspects sont visibles, dans la crĂ©ation des exercices en fonction du profil personnalisĂ© de lâenfant ainsi que dans la stratĂ©gie personnalisĂ©e dâapprentissage et dâexpĂ©rimentation. En cela, elle se diffĂ©rencie de la plupart des Ă©tudes concernant les TICE et lâautisme qui testent des applications Ă©laborĂ©es Ă partir de savoirs gĂ©nĂ©raux sur lâautisme. Une adĂ©quation progressive entre lâapproche pĂ©dagogique spĂ©cialisĂ©e de lâenseignante et lâergonomie de lâapplication a Ă©tĂ© mise en Ćuvre. Conceptions, observations, rĂ©troactions participent Ă un dĂ©terminisme circulaire qui aboutit Ă une gestion de plus en plus prĂ©cise de lâoutil. Une thĂ©orisation ancrĂ©e a permis de donner de lâintelligibilitĂ© au processus Ă travers une approche fondĂ©e sur les singularitĂ©s. On remarquera toutefois que lâenseignante Ă©tait Ă la base favorable Ă lâintroduction des TICE avec ses Ă©lĂšves. Le problĂšme se serait probablement posĂ© diffĂ©remment si tel nâavait pas Ă©tĂ© le cas ou mĂȘme si lâenseignant avait Ă©tĂ© rĂ©fractaire Ă lâusage des TICE. Cette expĂ©rience, Ă©tant singuliĂšre, demanderait Ă ĂȘtre menĂ©e dans dâautres contextes. Dans lâoptique de la thĂ©orie ancrĂ©e, les nouvelles donnĂ©es pourront constituer un tout avec celles recueillies lors de cette Ă©tude, afin dâapprofondir cette recherche. Ce travail pourra ĂȘtre menĂ© dans de futurs travaux, dans une optique comparative avec cette premiĂšre expĂ©rience, qui nous permettront dâaffiner voire de modifier notre modĂ©lisation thĂ©orique. 64Il pourrait Ă©galement ĂȘtre envisagĂ© dâĂ©laborer une recherche concernant lâĂ©volution des compĂ©tences des Ă©lĂšves utilisant les applications construites pour eux avec GĂ©nex, Ă moyen ou long terme.
Des parents ont eu l'idĂ©e de s'appuyer sur l'intĂ©rĂȘt de leur enfant pour les dessins animĂ©s pour le soigner. Le premier colloque international sur cette voie nouvelle s'est tenu Ă l'universitĂ© de Rennes 2. L'affinity therapy», ou thĂ©rapie par affinitĂ©, va-t-elle rĂ©volutionner la prise en charge de l'autisme? L'idĂ©e est sans doute prĂ©maturĂ©e, mais l'espoir, lui, est bien rĂ©el. Comme chaque fois qu'une nouvelle approche apparaĂźt. Le premier colloque international sur l'affinity therapy» qui s'est tenu en France, Ă l'universitĂ© de Rennes 2, les 5 et 6 mars, a tentĂ© d'en tracer les contours, mĂȘlant tĂ©moignage de parents et de professionnels. Psychanalystes et comportementalistes de bonne volontĂ© pourraient bien y retrouver leurs petits. Car cette fois la mĂ©thode ne vient pas d'une quelconque chapelle mais de Ron et Cornelia Suskind, les parents d'un enfant alors ĂągĂ© de 3 ans atteint d'autisme rĂ©gressif, Owen, aujourd'hui ĂągĂ© de 23 ans. Nous avons dĂ©veloppĂ© la thĂ©rapie par affinitĂ© aprĂšs avoir rĂ©alisĂ© qu'Ă 6 ans et demi, Owen avait appris par cĆur des dizaines de dessins animĂ©s de Disney», explique Ron, brillant journaliste politique du Wall Street Journal, laurĂ©at du prix Pulitzer. Lui et sa femme feront fi des rĂ©ticences des thĂ©rapeutes qu'ils soient d'obĂ©dience analytiques ou comportementales, certains enclins Ă bannir un intĂ©rĂȘt manifestement exagĂ©rĂ© risquant, finalement, de constituer une source d'isolement accru, d'autres prompts Ă s'en servir comme un simple outil de rĂ©compense ou de punition. Ron et Cornelia dĂ©cident au contraire de se servir de cet intĂ©rĂȘt particulier de leur fils afin de renouer avec lui les fils d'un contact devenu impossible. Ils racontent cette aventure sous la plume de Ron dans un livre publiĂ© en avril 2014 aux Ătats-Unis Life Animated. C'est un rĂ©cit fascinant, reconnaĂźt le psychanalyste Ăric Laurent, comme expĂ©rience de l'investissement de toute une famille pour inventer une langue et une mĂ©thode Ă partir d'un intĂ©rĂȘt spĂ©cifique.» Inventer une langue ou apprendre celle de l'enfant? C'est la deuxiĂšme hypothĂšse que retient Ron Suskind Cornelia connaĂźt le langage d'Owen». Comme si Owen avait trouvĂ© sa propre voix», note Myriam Perrin, professeur en psychopathologie Ă Rennes 2, Ă l'initiative du colloque .Le plus puissant catalyseur» L'idĂ©e de s'appuyer sur les passions d'un enfant autiste n'est Ă©videmment pas nouvelle, mais en faire la colonne vertĂ©brale de la prise en charge l'est indĂ©niablement. Pour Jean-Claude Maleval, professeur de psychopathologie et de psychologie clinique, Ron Suskind fait le mĂȘme constat que Kristine Barnett auteur de L'Ătincelle montrer Ă un enfant que l'on prend sa passion au sĂ©rieux et que l'on veut partager avec lui est le plus puissant catalyseur au monde». Il pense toutefois que s'il est une originalitĂ© dans la âDisneythĂ©rapieâ, elle rĂ©side dans le savoir inhĂ©rent Ă la passion d'Owen pour les films de Disney car ils se prĂȘtent Ă l'apprentissage du langage et des relations sociales». Est-ce une façon de nier que toutes les affinitĂ©s ne se valent pas et que certaines ne pourraient pas servir de support Ă ce type de thĂ©rapie? Ce serait alors une sĂ©rieuse limitation au champ de cette approche car les intĂ©rĂȘts spĂ©cifiques des autistes se portent aussi bien sur des dessins animĂ©s, que sur des livres, des cartes, des bandes dessinĂ©es. Myriam Perrin ne le pense pas. Selon elle, il faut au contraire soutenir les intĂ©rĂȘts et les passions quelles qu'elles soient». Car la thĂ©rapie d'Owen et ses Ă©changes se sont fortement appuyĂ©s sur l'utilisation des dialogues notamment en les rejouant avec lui, des situations et des personnages de ses dessins animĂ©s prĂ©fĂ©rĂ©s. Notamment en rejouant des scĂšnes avec lui! Le psychologue de Silver Spring Maryland, Dan Griffin, qui suit Owen depuis qu'il a 13 ans, raconte avoir perçu un changement de comportement spectaculaire C'Ă©tait comme le jour et la nuit comparĂ© Ă mes autres interactions avec lui.» Et surtout cette constatation saisissante Quand il jouait un rĂŽle, il semblait totalement vivant et prĂ©sent.»Nous n'avons pas de mode d'emploi» Bien sĂ»r les partisans d'une vision psychodynamique de l'autisme se rĂ©jouissent de l'intĂ©rĂȘt que suscite l'Affinity therapy» en rĂ©affirmant, selon les mots de Myriam Perrin, la façon singuliĂšre des autistes d'ĂȘtre au monde». De lĂ Ă y voir la remise en cause des approches comportementalistes, cela semble bien prĂ©somptueux. Ne serait-ce qu'en considĂ©rant leurs succĂšs visant Ă rĂ©duire les comportements problĂ©matiques ou Ă amĂ©liorer l'autonomie. Ă l'inverse, les comportementalistes auraient tort de rejeter cette nouvelle approche au seul motif que les analystes s'y intĂ©ressent. Finalement, la thĂ©rapie par affinitĂ© pourrait trouver un Ă©cho plus direct chez les parents. Comme le disent ceux d'Emmanuel, un autiste passionnĂ© de trains, dans l'excellent documentaire de Marina Julienne et Martin Blanchard qui sera diffusĂ© le 31 mars sur Arte Nous n'avons pas de mode d'emploi, on essaye, on voit ce qui marche, on a toujours fait ça.» Ă charge pour les experts de dĂ©finir rapidement le champ et l'intĂ©rĂȘt de cette thĂ©rapie, pour Ă©viter le dĂ©senchantement. Ce serait un comble pour une approche nĂ©e dans les douces notes de La Petite SirĂšne. LA RĂDACTION VOUS CONSEILLE Des thĂ©rapies validĂ©es dans le plan contre l'autisme Une application Kirikou pour aider les enfants autistes Hugo Horiot, autoportrait d'un ancien autiste Des applications sur iPad pour aider les enfants autistes
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